Alyah, est un mot hébreu signifiant littéralement « ascension » ou « élévation spirituelle ». Ce terme désigne l'acte d'immigration en Terre sainte (Eretz Israël, en hébreu) par un Juif. Les immigrants juifs sont ainsi appelés Olim
Le processus psychologique de l'Alyah dépasse de beaucoup le simple fait de quitter la France pour s'installer, définitivement en Israël. Faire son Alyah oblige à relever de nombreux challenges, à traverser des périodes de doutes, de remise en question, et surtout à opérer un certain changement d’identité.
L’Alyah est un engagement avec le risque d’échec au filigrane.
Dans un premier temps, se prend la décision de quitter la France. C est processus qui peut durer très longtemps, ou au contraire se réaliser de façon brutale et soudaine. L’Alyah est synonyme de changement de culture essentiel par rapport à l’Europe.
Les séparations qui en découlent font écho aux séparations infantiles, elles remettent en question les liens familiaux. Avec ces changements commencent des phénomènes de deuil, deuil inhérent aux changements de vie recherchés ou imposés. Les pertes innombrables dans le sentiment de compétence et dans la qualité des relations à soi et à autrui deviennent lourdes, troublantes.
Les standards sont différents. Il faut les accepter et se soumettre à une culture moins apprêtée et conventionnelle qu’en Europe. Les israéliens ignorent tout des attitudes de ‘réserve’ qui sont encrées en nous depuis notre plus tendre enfance.
Dans un second temps, s'opère la phase de transition durant lesquelles la France est devenu une part du passé, alors qu’Israël n'est pas encore acceptée comme lieu de projection. Nous sommes déjà partis, mais nous ne sommes pas encore arrivés.
La migration, introduit des modifications dans la structure familiale et change l’équilibre du système. Désormais, la famille se réduit dans la majorité des cas au couple parental et à leur progéniture.
Certains problèmes où événement de la vie, jusqu’à là couvert par le groupe large (familial, social) peuvent apparaître et, exposer certains membres de la fratrie à quelques décompensations. Les liens d’amour et de fidélité peuvent se consolider ou bien s’affaiblir ; la participation des membres change…
La distribution des rôles, du travail et de l’autorité se modifie entre les parents
En fait, dans la migration tout change ! Car face à ces enfants qui sont scolarisés et ceux qui vont naitre ici et qui vont parler l hébreu, le père peut ne plus apparaitre comme l’autorité à qui l’on doit obéir, mais plutôt, comme quelqu’un qui aurait l’air d’être dépassé !
Le processus psychologique par lequel ce processus se termine est intimement lié à l'acquisition de la langue. Cette acquisition se fait d'abord au niveau interpersonnel, nous permettant de nous situer dans notre nouvelle réalité sociale. L'acquisition de nouveaux codes linguistiques, le sentiment de comprendre et d'être compris sera suivi en parallèle par un changement dans le sentiment de continuité interne, de cohérence entre les diverses parties du Soi exprimées sur des registres linguistiques différents. C'est par un lien qui se crée continuellement entre les couches profondes, archaïques, préverbales et la capacité de les transcrire dans la nouvelle langue, que celle-ci sera adoptée comme moyen d'expression (Stern, 1995). Ce processus, indépendant de la compétence linguistique, ne peut cependant se faire sans une période transitoire pendant laquelle le sentiment d'identité est mis à l'épreuve et en conséquence réveille des sentiments nostalgiques pour la période pendant laquelle cette identité était assurée.
L'immigration se traduit par la capacité de se situer par rapport à une double identité, les références à une double culture et le sentiment d'unicité qui transcende cette dualité.
Il faut reconstruire seul en l’espace de quelques années, ce que des générations ont lentement élaboré et transmis. L’immigration, consiste donc modifier l’enveloppe tout en tâchant de préserver le noyau. (Rester fidèle à la mémoire de l’origine, ne pas oublier d’où l’on vient…Pour mieux savoir où l’on va). Le Migrant va donc établir un clivage entre sa culture d’origine et la culture d’accueil.
Pour les enfants, c’est la même chose ! Qu’ils soient nés en France ou en Israël. Pour survivre dans cet univers inconnu, ceux-ci, devront très vite établir un clivage entre le monde du dedans et le monde du dehors. Quant à leur intégration, ces enfants apprennent très vite la langue et les traditions d Israël. Mais cet apprentissage peut rester de surface…l’affectivité étant profondément ancrée dans le terreau originel.
En effet, la parenté, les amitiés, les références, la langue et l’accent ; tout paraît artificiel comme présenté pour la galerie ! Ceci, étant dû au fait que trop fragilisés eux-mêmes, les parents ne sont pas capables d’effectuer des ponts entre la culture d’origine et celle du pays d’accueil, pour faire découvrir à leurs enfants ce nouvel univers de façon progressive et sans heurt.
Préservant ainsi le dedans du dehors…il va s’ensuivre chez eux, une délimitation des espaces assez floue…
Pour ces enfants de migrants, ce clivage auquel ils sont obligés de recourir pour vivre dans les 2 mondes, va entraîner des processus de « Déni » portant notamment sur la filiation ! « Je ne ressemble pas à mon père…Je ne suis pas comme eux…Je n’ai rien à voir avec toutes leurs histoires du passé ! Je suis né ici, je suis Israélien ! Ou au contraire, on pourra entendre…Je suis Israélien et fière de l’être… je revendique mes origines et n’ai rien à voir avec la France.
Quant aux parents, ces derniers de leur côté, perçoivent leurs enfants comme « différents d’eux »…comme étranges… qui se conduisent comme les israéliens, parlant leur langue, parfois mieux que la langue d’origine, utilisant ces nouvelles manières de faire, avec une aisance presque inquiétante !
Ces enfants, qu’il est difficile de suivre parfois au point de vue scolaire parce qu’ils ont un niveau que ni le père ni la mère ne possèdent !
Mais, on peut avoir aussi, tout et son contraire avec des parents, très vigilants voire, très rigides quant aux études de leur progéniture qui doit être l’objet de la fierté familiale.
Même, dans des milieux très démunis. Le père étant prêt à tous les sacrifices pour la réussite des enfants.
Et puis il y a la langue…
L’investissement de la langue du pays d’accueil, dépend de la valeur accordée par les parents : cette nouvelle langue est-elle dotée d’un certain prestige ?
Est-elle objet d’inversion en étant le moyen de communiquer, avec une classe dominante ? A l’inverse la langue familiale est-elle estimée comme véhicule d’une culture revendiquée ?
Sur le plan de la langue, la perte d'une maîtrise des termes de la vie courante dans son cadre d'origine, le désengagement des termes employés dans la nouvelle langue à propos de l'expérience vécue va approfondir les difficultés de l'immigrant à traduire pour autrui les rappels de son identité passée.
Quant le cas du problème linguistique se pose avec l’extériorité, on assiste alors une inversion des générations ; où les enfants deviennent très vite, les parents de leurs propres parents (Processus de parentification précoce).
Par exemple : lorsqu’une fillette, lit ou écrit une lettre pour son père. Ou bien quand un garçon accompagne sa mère qu’il sert d’interprète au médecin
Cette inversion rôles, va entraîner une modification radicale du cadre. Où, parents et enfants auront du mal à se situer ! En ce sens que les parents vont compter sur leur progénitures pour pérenniser la filiation mais aussi, pour reconstruire d’une certaine manière tout ce qui a été perdu ; au moment de l’exil. Or, c’est extrêmement difficile pour ces enfants d’être ici et là-bas…C’est-à-dire, d’être « DOUBLE » ; compte tenu de la difficulté d’intégration et de l’ambivalence des parents eux-mêmes. Il va s’en dire que ces difficultés seront d’une certaine façon associées à l’échec scolaire entre autres !
L’évènement migratoire semble être particulièrement fragilisant pour les enfants vers 3/4 ans et au moment de l’adolescence. Par ailleurs, l’apprentissage d’une Langue étrangère vers 7/9 ans pourrait être vécue, comme une véritable menace pour l’identité culturelle.
Quelque soit la cause de la migration, celle-ci, s’opère toujours entre deux mondes hétérogènes, dans lesquels le sujet devra apprendre à vivre.
En produisant un clivage entre sa propre culture et celle du pays d’accueil. Cependant, sa capacité de maîtrise lui permettra de se jouer d’un monde dédoublé, en lui donnant les moyens d’acquérir une certaine liberté vis-à-vis des règles communes.